Les lavoirs du temps 

Des nombreux lavoirs communaux qui jadis réunissaient les lavandières, un seul subsiste aujourd'hui. Celui de la source du Pré.

«Va faire la bugada» est une expression peu flatteuse qui peut être adressée à une femme que l'on veut éloigner parce qu'elle n’est bonne à rien. Et pourtant, quel mérite n'avaient-elles pas, nos aïeules, de faire leur lessive sans machine, ni savon, ni eau au robinet !

lavoirdupr%E9.jpgC’est sans aucun doute le lavoir du Pré qui fut construit le premier, tout près de la source bienfaitrice du même nom à l’origine du dicton légendaire : «a begu l'aïgo dou prat», celui qui a bu l'eau du Pré reste pour toujours attaché à La Ciotat ! Le Pré était un espace communal qui s'étendait derrière les petits chantiers de construction navale, mais bientôt ce lavoir s’avéra insuffisant et de surcroît, la proximité des abattoirs rendait l'eau insalubre. Il fallut plusieurs années pour organiser la distribution de l'eau à partir de cette source et des eaux souterraines venant du Mugel. Comme l’à écrit le maire Louis Cottard en 1859, il était urgent d'installer en ville des bornes fontaines pour «nettoyer les rues des cloaques» et «délivrer les ménagères de la taxe des porteuses d'eau», ainsi que de construire des lavoirs, car bien souvent «les pauvres ménagères devaient transporter leur linge à près d'un kilomètre hors des murs».

Le projet avait été étudié depuis 1832 par l'ingénieur hydrographe marseillais M. Harlingue et comportait aussi plusieurs abreuvoirs pour les chevaux. Ce n’est pourtant que vers 1868 qu'on put compter de nouveaux lavoirs et des bornes fontaines. Ces lavoirs dessinés par Harlingue étaient constitués de trois bacs, avec montants et encadrement en pierre de taille de La Ciotat. L'eau arrivait dans le bassin central qui était toujours propre, et s'écoulait dans les deux autres où les bugadières faisaient la lessive. A la cité ouvrière par exemple, les familles disposaient d'un lavoir pour deux bâtiments, situé dans une buanderie qui séparait les deux cours, et un tour de rôle était attribué par famille chaque jour de la semaine. Mais en centre-ville, les lavoirs réunissaient toutes les femmes du quartier.
L'un des plus connus fut construit en 1897, rue Castel, à la place de la halle à poissons, transférée derrière l'église. Ce lavoir couvert détruit en 1965 lors de la construction de la salle municipale Pelloutier, restera immortalisé dans le film de Fernandel «Les cinq sous de Lavarède». Le lavoir de la source du Pré disparut lui aussi un temps, suite à l'agrandissement des chantiers navals, mais sa réplique fut bâtie en 1924 à l’emplacement actuel. Le dernier lavoir, situé rue du Rocher, fut démoli en 1981.

Sécher à la pleine lune
On dit que les lavandières, depuis la nuit des temps, allaient dans les collines de Sainte-Frétouse au-dessous de la Vigie, chercher l'eau des torrents sauvages pour laver leur linge, et surtout, le faire sécher les nuits de pleine lune, pour qu’il soit plus blanc !

Une bonne lessive
La recette de la lessive par les Anciens : la «bugadière» étendait le linge dans un cuvier (une lessiveuse), en mettant le plus sale au fond, puis le recouvrait de cendres, et ainsi de suite jusqu'au plus fin en surface. Ensuite, elle versait de l'eau bouillante dessus qu’elle renouvelait plusieurs fois - on appelait ça «couler le linge» - avant d’aller le rincer aux lavoirs. Il fallait bien être deux pour essorer les draps, en les tordant. Et c'est aussi pour reconnaître son linge que la plupart du temps, les serviettes étaient brodées d'initiales.